Ce n’est qu’un début, commissaire Soneri / Valerio Varesi

Onzième enquête du commissaire Soneri, toujours un régal.

Ils ne sont pas si nombreux les personnages que l’on a hâte de retrouver. Des personnages avec lesquels on est quasi sûr de retrouver une atmosphère singulière, un truc difficile à cerner, mais reconnaissable dès les premières pages. On récupère le bouquin et neuf fois sur dix on sait que l’on va se régaler. Le commissaire Soneri de Valerio Varesi en fait partie et on peut remercier les éditions Agullo pour la découverte. Dans « Ce n’est qu’un début, commissaire Soneri », déjà onzièmes enquêtes du commissaire, un jeune homme est retrouvé pendu dans un vieux hôtel, puis peu de temps après un autre homme, Boselli, ancien leadeur charismatique du mouvement du soixante huit parmesan, subit une attaque au couteau devant chez lui qui va lui couter la vie. Le commissaire commence ses recherches et une partie de son propre passé commence à remonter à la surface. Les convictions politiques ressurgissent, tout comme les contradictions de chacun et chacune. L’intrigue entraine le lecteur d’une fausse piste à une autre avec juste ce qu’il faut de descriptions pour immerger le lecteur dans Parme et ses environs. On entre dans la psyché torturée, mais lucide de Soneri. Une nouvelle master class de Valerio Varesi qui mène toujours aussi bien sa barque dans le roman noir italien.

Le camp des autres / Thomas Vinau

L’histoire d’un enfant qui rencontre des brigands au début du XXe siècle.

« Le camp des autres » c’est l’histoire d’un garçon qui fuit son père violent au début du XXe siècle. En ville, Gaspard va croiser des apaches et à la campagne, des trimardeurs et des bohémiens. Toutes ces femmes et ces hommes ont en commun d’être des brigands recherchés par les brigades mobiles de l’époque (futures brigades du tigre). Et Gaspard, jeune homme et personnage principal de Thomas Vinau, croise la route de ces brigands en fuyant. Nous sommes au début du XXe siècle et en réponse à ces groupes qui sillonnent les campagnes, on voit donc apparaître les brigades du tigre, l’ancêtre de la police judiciaire. « Ils entreront un peu plus tard dans l’histoire en criblant de balles la bande à Bono ». On suit dans ce contexte de lutte la trajectoire de cet enfant qui fuit la violence, qui doit grandir trop vite et qui en même temps côtoie les brigands de cette « caravane à pépère » qui a vraiment existé. Une caravane qui rassemblait des exclus, des marginaux et qui va donner un sens à la vie déjà bien cabossée du jeune Gaspard. Thomas Vinau est précis dans ses descriptions et il restitue avec beaucoup de poésie une atmosphère sylvestre, la vie de ces marginaux ou la vision du monde à travers les yeux d’un enfant.

Extrait de la postface : « Je continue avec vous, avec eux, avec l’armada de nos armures merdeuses, et la possibilité d’un demain à sauver, à inventer. Alors j’ai voulu écrire la ruade, le refus, le recours aux forêts. J’ai voulu construire un refuge. J’ai voulu écrire la liberté crue de l’enfance, du monde sauvage et de la récalcitrance. »

Le camp des autres, ed. Alma, 17 euros, 196 pages.

Sous la ville rouge / René Frégni

Trajectoire d’un écrivain marseillais qui ne parvient pas à se faire éditer, sous la plume de René Frégni.

Charlie vit à Marseille et fait de la boxe dans un petit club de son quartier. Le reste du temps, il écrit chez lui et tente de se faire publier. Après de nombreux refus dans différentes maisons d’édition parisiennes, Charlie n’est plus très loin de se décourager. Pourtant il prend le pouls de sa ville comme personne. Mais rien à faire l’inspiration ne suffit pas et cela ne fonctionne pas. Jusqu’au jour où un éditeur le rappelle, son écriture lui plait et il souhaite le rencontrer à Paris. On retrouve les thèmes qui parcourent l’œuvre de René Frégni, de la prison au désir d’écriture en passant par la description de sa région et de Marseille. Les rencontres sont aussi très importantes et les personnages qui entourent Charlie sont marquants. L’auteur s’attarde sur des atmosphères et il saisit très bien celle de Marseille dans ce court roman qui peut se lire d’une traite. L’écriture est pleine de poésie et comme souvent chez l’auteur on passe un très bon moment de lecture.

Sous la ville rouge, ed. Folio, 6,90 euros, 144 pages.

Moscow / Edyr Augusto

Un court roman noir tendu et violent. Une claque.

Moscow est le surnom de l’île de Mosqueiro, une île dans l’état brésilien du Para. Une île qui voit sa population tripler grâce au tourisme et à une jeunesse qui vient de Belém pour faire la fête. Un groupe de jeune qui vit la majorité du temps la nuit en profite pour faire les 400 coups sur l’île, terroriser les touristes ou se servir là où ils trouvent de l’argent. Tinho Santos fait partie de cette bande et c’est loin d’être le moins agressif du lot. Tinho avec un détachement bien à lui profite avec ses potes de sa jeunesse. Et ce personnage cache en plus en lui des démons qu’il a parfois bien du mal à maîtriser. Ajoutez à cela le talent et la plume d’Edyr Augusto qui mélange la narration et les dialogues sans un temps mort, et on a un petit bouquin redoutable. Un excellent roman noir. À noter le très bon travail de Diniz Galhos à la traduction.

Moscow, ed. Asphalte, 12 euros, 144 pages.

Quartier rouge / Simone Buchholz

Premier roman noir avec Chastity Riley la procureure barrée de Simone Buchholz. Et première réussite.

Après avoir découvert la procureure Chastity Riley dans « Nuit bleue », je continue de lire les romans noirs de l’autrice Simone Buchholz avec « Quartier rouge » et c’est toujours aussi prenant. On prend beaucoup de plaisir à se retrouver de nouveau à Hambourg. Cette fois-ci Chastity se retrouve face au cadavre d’une jeune femme scalpée. À priori une stripteaseuse et malheureusement ça ne sera pas la seule victime dans cette histoire. Dans ce premier roman noir de la série, on distingue déjà le ton singulier de la romancière qui n’a pas son pareil pour camper une ambiance ou une atmosphère. On est embarqué avec Chastity et son entourage de bras cassés, de Faller le commissaire au ton paternel à Klatsche avec qui la procureure noue des relations épisodiques, sans oublier Clara la bonne pote du bar qui devient souvent le QG de Chastiy, lorsqu’elles ne sont pas toutes les deux devant un match de Santk Pauli en troisième division. Il semblerait que le meurtrier manipule ses victimes dans l’affaire qui occupe la procureure. Les filles le suivent sans hésiter. En passant par des moyens pas toujours légaux, Chastiy va se lancer dans l’enquête avec son tact légendaire et encore une fois on est complètement embarqué dans ce roman noir aux dialogues savoureux. Même si c’est le premier de la série il y a déjà une forme de maturité dans la plume de Simone Buchholz.

Traduit de l’Allemand par Joël Falcoz.

Quartier rouge, ed. Piranha, 16,90 euros, 208 pages.

Sans collier / Michèle Pedinielli

Diou dans ses œuvres.

Ghjulia Boccanera est de retour pour notre plus grand plaisir et on ne va pas se mentir on avait hâte de la retrouver. Pour celles et ceux qui ne l’auraient pas encore rencontré, Ghjulia Boccanera alias « Diou » est une quinqua détective privée qui habite le Vieux Nice avec son coloc’ Dan. Ce dernier est un vrai oiseau de nuit et tient une galerie d’art le reste du temps. Honnêtement c’est difficile de ne pas s’attacher à ce personnage que je trouve particulièrement réussi depuis « Boccanera », le premier roman noir de Michèle Pedinielli avec la première apparition de Diou. Elle a une répartie d’enfer et n’est jamais bien loin lorsqu’il s’agit d’aller manifester contre le dernier projet absurde de la ville dans laquelle elle vit. Entourée d’une troupe de joyeux drilles que l’on retrouve de bouquin en bouquin, on ne peut qu’adhérer aux aventures de Diou. « Sans collier » ne fait pas exception, on est pris dans l’intrigue, dans ce juste dosage entre humour, moments plus dramatiques et ambiance niçoise bien propre aux polars de l’autrice. Dans ce dernier roman, il semblerait que des accidents du travail ne soient pas déclarés dans les règles de l’art sur un grand chantier niçois. Le gérant de la société de BTP qui s’occupe du chantier décède peu de temps après d’une crise cardiaque et un ouvrier disparait. Diou décide de mettre le nez dans l’affaire pour comprendre ce qu’il se cache derrière tout ça. En parallèle à cette première narration, l’autrice raconte l’histoire de Ferdi un SDF que Diou a rencontré dans un livre précédent. Ferdi a fait partie par le passé des « cani sciolti », les chiens sans collier, des groupes en Italie dans les années 70 qui ne souhaitaient faire partie d’aucune organisation politique. Le passé et le présent s’imbriquent parfaitement dans ce nouveau roman noir entre Nice et Bologne.

Sans collier, ed. de l’Aube, 18,90 euros, 256 pages.

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