Colombian psycho / Santiago Gamboa

Je découvre Santiago Gamboa avec ce polar redoutable en Colombie et c’est une vraie réussite.

Des os sont retrouvés dans une friche de Bogota. Il manque le tronc et la tête et l’évènement macabre laisse les forces de l’ordre du coin dubitatives. Jusqu’au moment où l’on se rend compte que l’homme à qui appartiennent les membres humains est vivant et qu’il est en prison. Un procureur, Edilson Jutsiñamuy, une journaliste Julieta et sa secrétaire Johana, une ex-guérillera, vont chercher à comprendre ce qu’il s’est passé. À partir de là Santiago Gamboa campe un polar très sombre et qui se dévore malgré les 600 pages. L’intrigue s’inscrit dans l’histoire politique complexe de la Colombie et pour autant on ne se perd pas un seul instant. Au contraire on découvre un pays aux ramifications complexes, gangréné par la violence. Le talent de conteur hors pair est indéniable chez Santiago Gamboa. « Colombian psycho » est le premier roman de l’auteur que je découvre et surement pas le dernier. À noter que le romancier fait une apparition (voire un peu plus) dans son récit et c’est plutôt bien amené. Du très bon roman noir de bout en bout.

Colombian psycho, ed. Métailié, 23 euros, 592 pages.

Les Routes oubliées / S.A Cosby

Le parcours d’un ancien braqueur, pilote hors pair, rattrapé par son passé.

Beauregard est garagiste et père de famille. Il tente de laisser derrière lui son passé trouble de braqueur mais des problèmes financiers l’obligent à remettre le nez dans des magouilles. Beauregard, conducteur hors pair, se retrouve alors au milieu d’un braquage qui ne va pas se passer comme prévu. C’est le début des emmerdes pour lui mais aussi pour sa famille et ses proches. Dans « Les routes oubliées » on retrouve ce qui avait bien fonctionné dans le « Le sang des innocents ». Un récit prenant et des pages qui défilent, des personnages attachants, une Amérique à plusieurs visages, dont celui du racisme. J’ai peut être un peu moins accroché à ce roman noir par rapport au dernier de l’auteur. Moins politique et peut être plus classique dans sa trame. Pour autant S.A Cosby reste une valeur sûre et il est redoutable pour offrir au lecteur un très bon moment de lecture.

Les routes oubliées, ed. Sonatine, 22 euros, 352 pages.

L’Horloger / Jérémie Claes

Un homme est exfiltré des USA alors qu’il est une cible pour des suprémacistes blancs.

Jacob est un universitaire infiltré dans les rangs des suprémacistes américains. Il observe leurs façons de faire et finit par obtenir des informations importantes pour que les forces de l’ordre arrêtent plusieurs têtes pensantes du réseau. C’est à partir de là que la vie de Jacob Dreyfus est en danger, car il devient une cible pour ces suprémacistes blancs. Malgré l’arrestation des chefs, les milices continuent d’œuvrer dans l’ombre et les actions racistes et violentes se multiplient à travers le territoire américain. Jacob a des difficultés à réaliser le danger qui le guette depuis son infiltration, jusqu’au jour où c’est sa femme qui est prise pour cible. S’ensuit une longue exfiltration et dix ans loin des États-Unis avant que cette affaire le rattrape, lui et sa famille. Jérémie Claes écrit un pur thriller rythmé et documenté, qui dans une succession de chapitres courts permet au lecteur d’être immédiatement dans le bain. « L’horloger » fait écho politiquement à de nombreuses situations contemporaines, pas uniquement aux USA. Les personnages ne sont pas en reste, ni bâclés et on s’attache à ces parcours de vie tous plus romanesques les uns que les autres.

L’Horloger, ed. Héloïse d’Ormesson, 22,90 euros, 464 pages.

Okavango / Caryl Ferey

Le dernier polar de Caryl Ferey avec la question du trafic des animaux sauvages pour thème central.

Dernier polar en date de Caryl Ferey et cette fois-ci direction une réserve animilière à la frontière namibienne, non loin du fleuve Okavango. La ranger Solanah Betwase est sollicitée pour se rendre sur la réserve à la suite de la découverte d’un corps sans vie. Un jeune homme qui semble avoir été assassiné au milieu de la brousse. La ranger qui n’a pas l’habitude de gérer des meurtres se retrouve sur cette affaire car il semblerait que ce meurtre soit lié a du braconnage, une pratique interdite et courante dans la région, qui brasse des sommes astronomiques d’argent. Solanah et son collègue Seth ne sont pas au bout de leurs surprises lorsqu’il font la connaissance du gérant de la réserve animalière, l’énigmatique John Latham. Ce propriétaire de réserve est un personnage complexe et on a bien du mal dès le début du roman noir à comprendre si cet homme peut devenir un ennemi ou un ami pour Solanah. Sa relation aux animaux notamment est ambiguë et Solanah se méfie. Le rythme est toujours aussi enlevé comme souvent chez l’auteur, la documentation est fournie et c’est tout un trafic autour des animaux sauvages que l’on découvre dans ce polar qui fait un peu penser au travail de Colin Niel dans un autre roman, « Entre fauves ». « Okavango » est un roman noir dans lequel on sent la colère de l’auteur affleurée derrière ses personnages. Au passage et c’est loin d’être évident, on découvre une nature très bien décrite à travers des atmosphères et les comportements des animaux.

Okavango, ed. Gallimard, coll. Série noire, 21 euros, 544 pages.

La mariée de corail / Roxanne Bouchard

Seconde aventure de l’enquêteur Moralès dans un cadre toujours aussi dépaysant.

Angel Roberts est capitaine de son homardier au milieu des hommes en Gaspésie. Une femme dans un monde d’homme. Chaque année, elle fête son anniversaire de mariage avec Clément Cyr son conjoint. Elle remet pour l’occasion sa robe de mariée et cette année les choses ne vont pas se passer comme d’habitude. On retrouve dans ce roman noir l’enquêteur Joaquin Moralès depuis peu dans la région. Son fils Sébastien débarque pour le rejoindre suite a une relation difficile avec Maude sa conjointe. Un fils qui a du mal à comprendre son père et qui en même temps permet au lecteur de découvrir une nouvelle facette de Moralès, en tant que père. Sébastien se sent comme un poisson dans l’eau au milieu des pêcheurs et s’intègre bien aux coutumes du coin. Il tente aussi de recréer une relation avec son père et c’est très bien amené par la romancière. Après avoir quitté une affaire où une femme a pris une place importante dans sa vie dans le roman précédent (« Nous étions le sel de la mer »), l’enquêteur Joaquin Moralès se dirige vers une intrigue avec une disparition inquiétante. Roxanne Bouchard campe à nouveau l’atmosphère particulière du bord de mer Gaspésien que l’on trouvait déjà dans le précédent roman. Les marins vivent parfois en vase clos avec la communauté sur terre et Moralès n’est pas toujours le bienvenu. Notamment lorsqu’il met le nez dans les affaires des uns et des autres pour son enquête et qu’il découvre des magouilles derrière les faux semblants. « La mariée de corail » est un polar qui sent bon l’air marin et qui sonne juste. On s’attache à cet enquêteur qui se cherche et qui en même temps a du mal à suivre les ruses des habitants du coin.

La mariée de corail, ed. de l’Aube, 22 euros, 456 pages.

L’Ange rouge / François Médéline

Un roman noir (très) sombre et prenant dans la ville des gones.

Alain Dubak et son équipe de la police criminelle vont se retrouver sur une affaire sordide fin des années 90. Un cadavre est retrouvé alors qu’il dérive sur la Saône sur un radeau. Mutilé, il est retrouvé dans une mise en scène glauque et Alain Dubak n’est pas au bout de ses peines pour donner du sens à ce premier meurtre qui en appelle d’autres. Le commandant peut compter sur son équipe. Flic intègre et qui traîne ses vieux démons notamment lorsqu’il travaillait pour les STUPS ou lorsqu’il pense encore à son ex compagne, il ne va rien lâcher. Entre les médias aux aguets et la hiérarchie qui préfère trouver un coupable au plus vite, l’équipe de Dubak va être embarquée dans une enquête complexe. Le tueur n’a pas prévu de s’arrêter. C’est rythmé, sombre et très efficace. On sent que François Médéline a une affection toute particulière pour Ellroy. « L’ange rouge » est un pur roman noir qui ne s’essouffle pas et qui nous montre une part sombre de Lyon. La ville et son atmosphère font parties intégrantes du récit tout comme la politique. Les personnages sortent de l’ordinaire et restent ambivalents tout au long de l’histoire. Mention spéciale à Mamy, seconde dans l’équipe de Dubak et lucide comme jamais sur ce qui se déroule devant leurs yeux. J’avais un très bon souvenir de « Les rêves de guerre » et je retrouve avec plaisir François Médéline dans « L’ange rouge », un polar qui envoie du bois et à la construction précise. On est à la limite du thriller et on a beaucoup de mal à lâcher ce roman noir. Redoutable.

L’Ange rouge, ed. La manufacture de livres, 20,90 euros, 506 pages.

L’agent Seventeen / John Brownlow

Un tueur à gages redoutable se retrouve dans un traquenard.

Il est redoutable et ne loupe jamais une mission. L’agent seventeen est le dix-septième d’une série d’agents secrets qui œuvrent dans l’ombre. On découvre un personnage à l’enfance difficile, avec son lot de traumas. Dans des chapitres courts et un récit ultra rythmé, l’auteur écrit un très bon divertissement, prenant. Seventeen est amené à recroiser un ancien agent au fil de l’histoire et cela ne va pas être de tout repos. Le bouquin est un juste dosage entre action et dialogues, cela donne au final un roman noir efficace. John Brownlow est en train d’écrire la suite et on a hâte de la découvrir.

L’agent Seventeen, ed. Gallimard, coll. Série Noire, 23 euros, 512 pages.

Le corps de la ville endormie / Gérard Lecas

Une enquête autour d’un couvent parisien, menée par deux personnages complexes de la BAC parisienne.

Malgré certains écueils dans celui-ci notamment le traitement des personnages féminins en grande partie résumées à leurs physiques, j’étais curieux de relire un roman noir de Gérard Lecas après avoir beaucoup aimé le dernier en date, « Le sang de nos ennemis ». C’est chose faite avec son court polar incisif, «Le corps de la ville endormie » sortie en 2012 après une longue pause d’écriture. Cette fois-ci direction Paris et la rue des Pyrénées dans le 20 ème arrondissement. Un homme est arrêté en train de taguer « sœurs assassines » sur les murs d’un couvent qui hébergent des adolescentes. Le lieutenant Danny Perez de la BAC est mis sur l’affaire avec Yasmina une stagiaire du service. Le duo fonctionne bien et l’enquête avance jusqu’à ce que les investigations commencent à brasser des choses plus personnelles pour les personnages. C’est là aussi que le roman devient intéressant. Les thèmes autour de la religion et de l’identité émergent et les personnages prennent ensuite petit à petit de l’épaisseur sous la plume de Gérard Lecas.

Le corps de la ville endormie, ed. Rivages, coll. Rivages noir, 7 euros, 176 pages.

Peter Punk au pays des merveilles / Danü Danquigny

Un homme sort de prison et se retrouve en deux temps trois mouvements au milieu d’une magouille dans laquelle il va brasser ses relations passées.

Desmund Sasse sort de prison au début du roman et s’apprête à retrouver Morclose, une ville bretonne fictive dans laquelle il a ses habitudes. Malheureusement Desmund est le genre de personnage qui a un don pour attirer les galères. Et ça ne loupe pas, peu de temps après sa sortie il se retrouve arrêté de nouveau par la police en étant suspecté de complicité de meurtre. Desmund alias « Peter Punk » a bien l’intention de ne pas retourner en taule et pour ça il va mener sa petite enquête pour comprendre dans quelle magouille il s’est retrouvée à son insu. Il reçoit à sa sortie des messages vocaux qui semblent être liés à l’affaire. Ses actions vont l’amener à côtoyer un ancien pote à lui devenu flic ou une détective privée qui va être amenée à lui sauver la mise. Deux autres personnages réussis et réalistes qui participent pleinement à l’atmosphère de ce pur polar dans la tradition du hard boiled. Danü Danquigny mène très bien sa barque, les dialogues sonnent juste et de petits pics bien senties se glissent dans le récit notamment sur l’institution policière et ses nouvelles pratiques du maintien de l’ordre. Du bon roman noir.

Peter Punk au pays des merveilles, ed. Gallimard, coll. Série noire, 19 euros, 289 pages.

Rétiaire(s) / DOA

Une lutte sans merci entre l’Office anti stupéfiants et des mafieux du milieu de la drogue.

J’avais découvert DOA dans son roman à quatre mains avec Dominique Manotti (« L‘honorable société ») et j’ai attendu la sortie de « Rétiaire(s) » pour remettre le nez dedans. Et punaise je n’aurais pas dû attendre. Quel souffle dans ce roman noir, DOA dans un art de la concision maîtrisé comme jamais écrit une histoire autour d’un flic à la dérive et du milieu de la drogue. C’est d’un réalisme à couper le souffle et évidement c’est hyper prenant. L‘OFAST (l’office anti stupéfiants) engage une lutte contre le redoutable clan des Cerda, un clan yediche qui a fait fortune dans la ferraille. Et qui connaît aussi des rivalités en son sein, tout comme l’OFAST d’ailleurs. Les flics ne sont pas en reste et sont capables de se tirer dans les pattes en pleine enquête. Les péripéties se déroulent en plein Covid dans l’hexagone, et on ne regrette pas un seul instant que DOA est décidé de faire un bouquin de ce scénario qui devait finir sur le petit écran à l’origine. Du lourd.

Rétiaire(s), ed. Gallimard, coll. Série Noire, 19 euros, 432 pages.

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