Le corps de la ville endormie / Gérard Lecas

Une enquête autour d’un couvent parisien, menée par deux personnages complexes de la BAC parisienne.

Malgré certains écueils dans celui-ci notamment le traitement des personnages féminins en grande partie résumées à leurs physiques, j’étais curieux de relire un roman noir de Gérard Lecas après avoir beaucoup aimé le dernier en date, « Le sang de nos ennemis ». C’est chose faite avec son court polar incisif, «Le corps de la ville endormie » sortie en 2012 après une longue pause d’écriture. Cette fois-ci direction Paris et la rue des Pyrénées dans le 20 ème arrondissement. Un homme est arrêté en train de taguer « sœurs assassines » sur les murs d’un couvent qui hébergent des adolescentes. Le lieutenant Danny Perez de la BAC est mis sur l’affaire avec Yasmina une stagiaire du service. Le duo fonctionne bien et l’enquête avance jusqu’à ce que les investigations commencent à brasser des choses plus personnelles pour les personnages. C’est là aussi que le roman devient intéressant. Les thèmes autour de la religion et de l’identité émergent et les personnages prennent ensuite petit à petit de l’épaisseur sous la plume de Gérard Lecas.

Le corps de la ville endormie, ed. Rivages, coll. Rivages noir, 7 euros, 176 pages.

Tu ne trahiras point / Karim Madani

Un riche documentaire sur le procès de Versailles, un procès où 56 graffeurs ont été traduits en justice.

Sacré livre documentaire, qui nous fait découvrir des graffeurs qui ont fait les frais d’une politique répressive au début des années 2000. Tout débute lors d’une perquisition pour de la drogue qui va se transformer en une saisie de matériels et de photos de graff. Deux ans d’enquête démarre et 56 graffeurs au total sont traduits devant la justice pour dégradation de biens publics en réunion. Une première. Des policiers du grand banditisme sont détachés dans un service spécifique pour s’occuper en particulier de ces affaires. Un lieu à gare du Nord est dédié à ces gardes à vue et dans les métros et les artères parisiennes, la surveillance est renforcée. Le procès restera unique par le caractère disproportionné des peines encourues. On parle de peinture sur des murs, sur des rames de métro. Pourtant les policiers et les sociétés de transport cherchent à charger les graffeurs. La guerre est aussi une guerre de communication pour donner une mauvaise image du graffiti.

« Tu ne trahiras point » relate avec précision les parcours des graffeurs témoins et acteurs du procès de Versailles. Ils sont issus de différents milieux sociaux et ils entrent dans une véritable guerre contre la SNCF et la RATP. Les uns voient des terrains illimités pour pratiquer leur art et les autres voient des vandales, des dégradations. Les points de vue s’entrechoquent. Karim Madani lève le voile sur un univers avec ses codes, ses pratiques mais aussi ses têtes d’affiche dès le début des années 80. Un univers où l’adrénaline est omniprésente et qui est au croisement de nombreuses cultures.

Ce livre aborde un thème que l’on voit rarement sur les étals des libraires. Il rend un très bel hommage aux premiers graffeurs parisiens.

Au passage je vous recommande le billet de blog et l’article d’Hugo Vitrani pour Médiapart sur ce procès.

Tu ne trahiras point, ed. Marchialy, 19 euros, 300 pages.

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