Starlight / Richard Wagamese

Une femme et sa fille fuient un mari violent et se réfugient chez Starlight, un fermier touchant qui vit en lisière de forêt canadienne.

Franklin Starlight vit dans sa ferme dans l’Ouest canadien et porte le deuil du vieil homme qui l’a élevé. Un vieil homme qui lui a appris à vivre dans la nature avec tout ce qu’elle représente. On sent qu’une relation forte a été tissée avant que le vieil homme meurt, lorsque Starlight était encore qu’un enfant et qu’il découvrait l’environnement autour de lui. On retrouve d’ailleurs la construction de cette relation dans un précédent roman de l’auteur, « Les étoiles s’éteignent à l’aube ». Dans ce dernier roman, Starlight est adulte et voit sa routine quotidienne avec son ami Roth chamboulée lorsqu’il croise la route d’Emmy et de sa fille Winnie. Emmy fuit un homme violent et tente de préserver sa fille. Starlight décide de les héberger dans sa ferme afin qu’elles ne soient pas poursuivies par les services sociaux. Winnie qui est une enfant turbulente à l’école va alors apprendre à connaître la nature au contact de ce singulier personnage. Un homme plutôt solitaire qui est capable de partir des jours dans la forêt pour ramener des clichés d’animaux magnifiques. Un homme qui rassure et qui sait l’importance des traditions notamment celles apprises par son mentor. C’est à partir de là que l’on voit ces quatre personnages apprendre à se connaître, en vivant dans la ferme de Starlight en lisière de forêt. Les romans de Richard Wagamese ont une atmosphère unique difficile à restituer. La nature à toute son importance mais les relations humaines aussi. Et on retrouve encore une fois dans ce dernier la sensibilité qui caractérise l’auteur, que ce soit dans les dialogues ou dans la construction de ses personnages. L’auteur est mort en 2017 sans avoir pu terminer ce roman et les éditions Zoé qui ont reçu le manuscrit inachevé ont décidé de le publier posthume. Un texte émouvant et marquant.

Starlight, ed. Zoé, 21 euros, 272 pages.

Une petite société / Noëlle Renaude

La romancière pose sa focale sur des personnages qui s’agitent autour d’une maison bien mystérieuse.

J’étais curieux de retrouver cette singulière autrice de roman noir qui avait été une belle surprise avec « Les abattus » chez Rivages. On retrouve rapidement ce ton dans « Une petite société ». De longues phrases, des fines observations de nos comportements humains et un talent certain pour déceler les zones d’ombre de nos pairs, Noëlle Renaude confirme ses qualités avec ce polar. Tom est un jeune handicapé qui vit reclus dans sa maison avec une mère de substitution. Et le voisinage les observe avec beaucoup de curiosité jusqu’au jour où ça déraille lorsque Tom tente d’enlever une jeune voisine. Noëlle Renaude s’attarde sur cette curiosité, parfois malsaine du voisinage qui permet de découvrir les personnages et leurs vies autour de cette maison. « Une petite société » est un polar à l’atmosphère unique qui renouvelle le genre. Le lecteur se laisse porter par les observations, par les jugements des personnages. Bienvenu dans un microcosme passé au peigne fin. Un microcosme parfois très sombre, à d’autres moment banal mais surtout qui sonne juste.

Une petite société, ed. Rivages, 22 euros, 408 pages.

U4 : Stéphane / Vincent Villeminot

Une épidémie se propage et les jeunes entre 15 et 18 ans survivent d’une manière bien mystérieuse.

Un étrange virus se répand dans la population en quelques jours. Les adultes meurent les uns après les autres, mais les adolescents entre 15 et 18 ans survivent sans explication. C’est dans ce contexte où chacun tente de survivre que Vincent Villeminot emmène son lecteur dans la ville de Lyon au début du roman. On y suit quelques personnages et notamment Stéphane une jeune fille qui tente de savoir si son père a survécu ou non à cette épidémie foudroyante. En effet son père est un médecin reconnu qui travaille sur les épidémies et il a mystérieusement disparu après l’apparition des premiers symptômes dans la population. On suit donc des ados qui tentent de survivre dans un environnement devenu hostile où chacun souhaite sauver sa peau. Vincent Villeminot comme toujours amène un récit rythmé et prenant. On retrouve une façon bien à lui d’aborder les relations notamment les relations familiales. Ça donne envie de lire les trois autres titres qui se passent dans le même environnement et qui ont été écrits par trois autres auteurs. Chaque roman se focalise sur les péripéties d’un jeune qui tente de surnager au sein de l’épidémie.

Stéphane, ed. PKJ, 7,95 euros, 456 pages.

Qatar, le Mondial de la honte / Nicolas Kssis Martov

Un petit essai stimulant sur une coupe du monde qui multiplie les polémiques.

Un bouquin d’actualité évidemment, mais un bouquin important et riche d’informations. L’auteur prend le temps de décortiquer les enjeux autour du football et notamment l’emprise de la FIFA et de l’UEFA. Les sommes d’argent brassées sont inimaginables et on comprend vite que les intérêts sont tout autres qu’uniquement footballistiques. Ça donne l’impression que la coupe du Monde au Qatar est un tournant en amenant un certain nombre de questionnements sur son organisation, ce qui a rarement été le cas à ce point-là dans les coupes précédentes. Que ce soit en matière de droit humain bafoué ou de respect des communautés LGBTQ ou encore de décès sur les chantiers lors de la construction des différentes infrastructures. Cette coupe du monde multiplie les polémiques et on sent de plus en plus que le sport derrière cette vitrine perd en saveur. Nicolas Kssis Martov propose ici un court essai important, à partager autour de soi pour discuter et mettre en perspective cette compétition cette année.

Qatar, le Mondiale de la honte, ed. Libertalia, 8 euros, 82 pages.

Le soir du chien / Marie-Hélène Lafon

L’histoire d’une rencontre dans un petit village du Cantal, avec tout ce que cela va engendrer.

Je découvre Marie-Hélène Lafon avec ce court roman et c’est une très belle découverte. L’autrice avec une plume sensible, dépeint le quotidien de Marlène une jeune femme qui vit dans le Cantal. Cette histoire c’est aussi celle de Laurent, menuisier, qui vit avec elle dans leur petite maison. Les choses vont petit à petit se mettent en place autour du duo qui profite de cette maison reculée. On découvre leurs proches, leurs façons d’appréhender le monde. Jusqu’à un soir et jusqu’à un accident, celui qui va venir chambouler leur belle routine. Ce roman est raconté à travers les sentiments de chaque personnage, à travers plusieurs voix. Marie-Hélène Lafon choisit chacun de ses mots et les phrases simples sonnent juste tout comme le rythme qui émerge du récit. « Le soir du chien » est un livre qui prend le temps de décrire les paysages du Cantal, qui prend le temps de poser une atmosphère.

Le soir du chien, ed. Points, 6,20 euros, 160 pages.

Deux secondes d’air qui brûle / Diaty Diallo

Une bande de potes fait face à un drame.

Lecture coup de poing ce roman de Diaty Diallo. Un premier roman qui aborde la question des violences policières mais aussi les répercutions sur le quartier, les vies de chacun, les quotidiens qui basculent. « Deux secondes d’air qui brûle » campe une atmosphère pleine de sons et d’amitiés. On y croise les paroles de SCH, des X-Men ou encore de PNL. On y croise un groupe de potes qui connaît les rouages aussi bien du quartier que les réactions prévisibles de la police. Il y a vraiment une forme de débrouille mise en évidence par l’autrice qui marque le lecteur. La violence et le stigmate que subissent ces jeunes quotidiennement sont loin d’être les seuls propos. Diaty Diallo s’arrête sur ce qui fait le quotidien des quartiers. Les motos à réparer, les barbecues montés, la solidarité. C’est tout un environnement qui se déploie sous la très belle plume de cette autrice, des parkings à une dalle de béton en passant par les toits des tours.

Deux secondes d’air qui brûle, ed. Seuil, 17,50 euros, 176 pages.

L’Urgence et la patience / Jean-Philippe Toussaint

Un court texte sur l’acte d’écrire et sur tout ce qu’il charrie.

Un petit texte de Jean Philippe Toussaint qui permet à l’auteur de revenir sur son écriture, ses procédés, son environnement de travail ou ses inspirations. Stimulant, mais un peu court, je découvre l’auteur avec ce livre plein de bons mots. On sent vite que rien n’est laissé au hasard dans le choix des tournures. Cette balance entre l’urgence et la patience qui donne son titre au livre a bien sûr une place centrale dans le questionnement sur l’écriture. C’est une façon très intéressante d’aborder les choses, d’un côté des temps d’écriture où les choses coulent dans une forme d’urgence et de l’autre des temps où attendre et laisser reposer les choses semblent nécessaire pour relancer la machine ensuite. L’auteur se livre sans détour et avec du recul, sans être prescripteur.

L’Urgence et la patience, ed. de Minuit, 11 euros, 112 pages.

Vallées secrètes / Bernard Minier

Entretiens avec Fabrice Lardreau.

Dans la collection Versant intime chez Arthaud, une autrice ou un auteur revient sur son parcours, son enfance, son rapport a un lieu ou encore à l’écriture. C’est au tour de Bernard Minier de se prêter au jeu dans Vallées secrètes, un court livre composé d’entretiens avec Fabrice Lardreau. L’auteur à succès revient sur son enfance et sur son rapport à la nature, notamment les Pyrénées, région dans laquelle il a grandit et qui est particulièrement importante pour lui. C’est d’ailleurs dans cet environnement qu’il situe plusieurs de ses polars. On remarque au fil des réponses que la montagne et l’imaginaire qui l’entoure ont beaucoup compté pour l’auteur, que ce soit dans son parcours d’écrivain ou plus globalement dans son rapport au monde. Bernard Minier en profite pour s’arrêter sur ces sources d’inspiration, sur ce qui fait le sel des ses livres en creusant un peu cette question. Une belle idée cette collection qui mélange la nature et les différents processus créatifs des écrivains.

Vallées secrètes, ed. Arthaud, 13 euros, 160 pages.

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