D’autres vies que la mienne / Emmanuel Carrère

L’auteur écrit sur des drames que des proches à lui ont traversés.

Emmanuel Carrèrent part de son vécu et relate des événements marquants de sa vie. Des événements à travers lesquels il a constaté de la souffrance ou du traumatisme dans son entourage. Avec une langue bien à lui il commence par relater l’après tsunami au Sri Lanka lorsqu’il était sur place avec sa conjointe. L’auteur échappe au tsunami dans son hôtel mais des proches à lui perdent leur fille dans la catastrophe. Il devient le spectateur d’un couple qui tente de traverser la perte d’un enfant. C’est aussi un livre sur la maladie, celle d’une autre proche de l’auteur. Sur la capacité de chacun et chacune à avancer malgré les épreuves.

D’autres vies que la mienne, ed. Folio, 8,70 euros, 334 pages.

Ce matin-là / Gaëlle Josse

Un épisode difficile dans la vie d’une femme, le récit d’une chute insidieuse.

Au fil des scènes de la vie d’une femme, le lecteur découvre les multiples raisons qui vont la mener au burn-out. Clara travaille dans une entreprise qui permet aux familles d’emprunter de l’argent, de petites sommes. Une boite qui permet des crédits à la consommation. Elle évolue dans son entreprise en ayant de plus en plus de responsabilités, mais le travail va finir par la submerger. Avec une plume sensible, Gaëlle Josse écrit un roman d’une justesse rare sur ce qui brasse son personnage principal. Tout ce qui s’insinue sans se dire dans la vie de Clara et qui va la rendre malade. Une dépression liée à une souffrance au travail. Tout est très visuel, mais aussi axé sur les sensations et le lecteur voit la chute de Clara se produire sous ses yeux. On est témoin de sa dépression, mais aussi de la perception de cette dépression dans son entourage. « Ce matin-là » narre l’histoire d’une femme qui tente de se réinventer, d’avancer malgré la violence qui affleure dans ce qu’elle traverse. Elle tente de se façonner pas à pas une nouvelle vie en s’appuyant sur l’amitié, sur ses souvenirs. Gaëlle Josse n’a pas son pareil pour retranscrire les ressentis de ses personnages, les petits détails dans les réactions qui font des différences dans leurs quotidiens. C’est très fort et ça l’est tout autant à la lecture.

Ce matin-là, ed. Notabilia, 17 euros, 224 pages.

Comme un léger tremblement / Gilles Pialoux

Un très beau roman qui aborde un sujet rarement traité en fiction, la SLA.

Philippe travaille dans un grand journal et a une vie de famille épanouie. D’un naturel curieux, il profite de ses temps libres en croquant par ci par là des scènes de la vie quotidienne sur son carnet. Il aime profiter des choses et s’entoure de nombreux copains. Un jour ou plutôt une nuit, sa conjointe lui fait remarquer qu’il a des tremblements lorsqu’il dort. Il se réveille le matin sans douleur et ne se rend compte de rien. C’est le début d’une découverte difficile à entendre, Philippe est atteint de la maladie de Charcot. Une maladie dégénérative où les muscles sont inutilisables les uns après les autres. La personne touchée peut de moins en moins se mobiliser et ne peut que constater l’irréversibilité de la maladie jour après jour. Philippe décide alors de vivre sa vie et de s’adapter en fonction des difficultés toujours plus nombreuses qu’il va rencontrer.

Ce roman inspiré d’une histoire vraie aborde avec justesse cette maladie, les effets qu’elle peut avoir sur l’entourage du patient ou la capacité de résilience dont certains patient.e.s font preuve. Le personnage principal en est un bel exemple, il fait passer au lecteur un souffle de vie malgré le sujet grave et les choses qui se compliquent au fil des mois pour lui. Il est d’une lucidité désarmante. C’est tout un rapport au corps qui est revu à la suite de l’apparition des premiers symptômes. Ce sont aussi des rapports qui se renouvellent avec l’entourage du patient, pas toujours pour le meilleur. Il y a de très beaux moments dans ce roman, dans ce récit plein de pudeur. Les courts chapitres servent bien le propos et alterne entre des passages où l’on côtoie une forme de poésie et des constats plus grave sur la maladie de Philippe. Gilles Pialoux livre un roman touchant et qui interpelle sur la sclérose latérale amyotrophique, sur la fin de vie. Merci à Babelio pour la découverte de ce livre reçu dans le cadre d’une Masse critique.

Comme un léger tremblement, ed. Mialet Barrault, 18 euros, 174 pages.

Nickel Boys / Colson Whitehead

Une maison de correction en Floride dans les 60’s devient le sombre reflet de la société ségrégationniste américaine.

Colson Whitehead s’inspire d’une histoire vraie pour mettre en scène une maison de correction appelée la Nickel Academy. Un établissement qui « remet les hommes dans le droit chemin ». La population réserve aux noirs un traitement tout particulier dans la Floride ségrégationniste des années 60, et la Nickel Academy ne fait pas exception. A l’intérieur même de la maison de correction, les traitements entre les blancs et les noirs sont différents. De son côté, le jeune Elwood Curtis réussit sa scolarité et tout en s’inspirant des discours de Martin Luther King, se dirige à son rythme vers l’université pour la suite de ses études afin de continuer ses réflexions. Malheureusement les choses vont rapidement se compliquer lorsqu’il est victime d’une erreur judiciaire qui l’envoie dans la Nickel Academy. Ces espoirs douchés, il tente de survivre dans un endroit qui fait subir les pires atrocités à ses pensionnaires. Il y rencontre Turner, un autre résident avec qui il va se lier d’amitié dans cet enfer.

Ce roman est porté par le très beau personnage d’Elwood, doté d’une capacité de résilience hors norme et qui tente de garder sa dignité malgré le racisme qu’il subit et qui règne dans l’État de Floride. C’est aussi un roman sur une amitié forte entre Turner et Elwood, qui ne sont pas toujours d’accord sur les façons d’agir mais qui se soutiennent. Colson Whitehead écrit une fiction qui remue et qui lève le voile sur une face cachée de l’Amérique.

Nickel Boys, ed. Le livre de poche, 7,40 euros, 264 pages.

Le Sourire du scorpion / Patrice Gain

L’auteur écrit sur la reconstruction d’une famille après un drame. Un très beau roman noir.

Une famille de baroudeurs décide de sortir dans un canyon en raft avec un guide pour se procurer de nouvelles sensations fortes. Malheureusement la petite aventure pour les parents et leurs deux enfants va tourner court et prendre une tournure dramatique. La suite du récit fait monter la tension progressivement et les personnages sont loin d’imaginer les découvertes et les conséquences liées au drame.

Patrice Gain écrit avec beaucoup de justesse sur la nature, sur la famille et sur les comportements humains. Les descriptions sans être trop longues sont importantes pour restituer l’atmosphère du roman. La nature peut être belle et dangereuse d’une page à une autre. La relation entre les jumeaux tout au long de l’histoire est aussi poignante. Ce roman noir qui sonne juste est très difficile à lâcher une fois démarrer. Une claque.

Le Sourire du scorpion, Ed. Le mot et le reste, 19 euros, 208 pages.

Je suis une sur deux / Giulia Foïs

Une reconstruction après un viol.

Un récit poignant et très bien écrit. Giulia Foïs livre un témoignage important. Ce n’est pas une lecture facile et ça remue pas mal. On retrouve sa plume alerte et son ton singulier, deux ingrédients qui fonctionnent déjà à merveille dans son émission « Pas son genre » sur France Inter.

Je suis une sur deux, Ed. Flammarion, 16 euros, 192 pages.

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