Au printemps / Karl Ove Knausgaard

Un récit autobiographique touchant sur la paternité.

Je découvre le cycle autobiographique de l’auteur avec « Au printemps ». Un cycle appelé « Le quatuor des saisons » et dédié à sa fille, son quatrième enfant. Un nouveau-né de trois mois à qui il s’adresse tout au long du livre, tout au long d’un trajet avec elle dans la campagne suédoise. Avec un ton plein de sincérité, Karl Ove Knausgaard relate à sa petite fille une journée de sa vie et notamment un drame qui va directement impacter son quotidien. C’est aussi l’occasion pour lui de se confier sur comment il a traversé cette épreuve, ou comment il vit sa paternité et les relations au sein de sa famille nombreuse. Au final cela donne un texte touchant et qui ne ressemble à aucun autre. On se laisse porter par ce bouquin. J’ai apprécié y revenir et retrouver sur de petites plages de lecture la plume de l’auteur.

Au printemps, ed. Folio, 8,90 euros, 256 pages.

D’autres vies que la mienne / Emmanuel Carrère

L’auteur écrit sur des drames que des proches à lui ont traversés.

Emmanuel Carrèrent part de son vécu et relate des événements marquants de sa vie. Des événements à travers lesquels il a constaté de la souffrance ou du traumatisme dans son entourage. Avec une langue bien à lui il commence par relater l’après tsunami au Sri Lanka lorsqu’il était sur place avec sa conjointe. L’auteur échappe au tsunami dans son hôtel mais des proches à lui perdent leur fille dans la catastrophe. Il devient le spectateur d’un couple qui tente de traverser la perte d’un enfant. C’est aussi un livre sur la maladie, celle d’une autre proche de l’auteur. Sur la capacité de chacun et chacune à avancer malgré les épreuves.

D’autres vies que la mienne, ed. Folio, 8,70 euros, 334 pages.

Le discours / Fabrice Caro

Fabrice Caro dans ses œuvres, drôle et acerbe.

Dans la foulée d’un roman noir italien plein d’humour, je continue dans le même registre avec « Le discours » de Fabrice Caro. Un livre où l’on retrouve le ton de l’auteur de « Zaï Zaï Zaï Zaï », c’est à dire plein de bons mots et des observations fines sur les comportements humains (la famille, les proches, le couple, le langage, etc.). Le narrateur hypocondriaque et au bout du rouleau se retrouve dans un diner de famille face à une demande : écrire le discours de mariage de sa sœur. Et là c’est le drame, le début des emmerdes. Cette demande va charrier plus de choses que l’on ne pense chez lui et Fabrice Caro se régale de digression en digression.

J’avais peur d’être un peu déçu après la BD, mais j’ai rapidement retrouvé ce regard acerbe de l’auteur sur la société. Savoureux.

Le discours, ed. Folio, 7,50 euros, 224 pages.

Malavita encore / Tonino Benacquista

La famille Blake dans ses œuvres.

La famille Blake est de retour pour le plus grand plaisir des amateurs de mafia et de manigances sous toutes ses formes. Tonino Benacquista a campé cette drôle de famille qui tentait de retrouver une vie normale après une vie de hors-la-loi dans le premier opus, Malavita. C’est avec joie qu’on continue de suivre leurs péripéties dans ce second opus, tout aussi mordant et décalé. L’auteur en profite pour glisser quelques réflexions sur l’écriture à travers ses personnages et c’est toujours aussi intéressant. Une suite plaisante à découvrir.

Malavita encore, ed. Folio, 8,50 euros, 400 pages.

La femme gelée / Annie Ernaux

Je continue la série avec une lecture qui m’a un petit peu remuée et qui date un peu (un livre lu au mois de septembre). Il s’agit de La femme gelée d’Annie Ernaux, lu en poche chez Folio.

C’est le premier livre d’Annie Ernaux que je lis et c’est une lecture âpre qui restitue la condition d’une femme (la vie de l’autrice) qui petit à petit renonce à son quotidien pour satisfaire son mari et les exigences de ce dernier (le foyer, le travail, le regard du voisinage, le regard dans la ville, etc.). C’est insidieux et très bien restitué par Annie Ernaux tout au long du livre. La langue ciselée frappe fort et au détour d’une phrase l’autrice peut raconter un événement rude avant de passer rapidement à un autre, le rythme étant aussi important dans cette lecture. Annie Ernaux porte un regard précis sur les actes du quotidien et on a vraiment le sentiment de voir au jour le jour à quel point la misogynie et les normes sociales défendues par son mari réduisent à néant les libertés de cette femme. Spectatrice de sa vie, elle construit progressivement son foyer et pourtant les questions demeurent. Dans quelles conditions construire ce foyer et pour quels renoncements ?

Je vous conseille fortement ce récit autobiographique et je suis curieux de lire vos retours si vous l’avez déjà lu ou si vous avez d’autres ouvrages à conseiller d’Annie Ernaux. J’aimerais beaucoup lire Regarde les lumières mon amour pour le prochain.

La femme gelée, ed. Folio (poche), 6,20 euros, 192 pages.

Moi, Tituba sorcière… Noire de Salem / Maryse Condé

J’ai découvert ce livre grâce à une suite de hors série, dans le podcast « La Poudre » animé par Lauren Bastide (podcast que je vous conseille vivement en passant). Cette suite de hors série était consacrée aux sorcières.

Tituba est fille d’esclave et cette dernière va faire partie du procès des « sorcières de Salem », un épisode de l’histoire coloniale américaine. Nous sommes vers la fin du 17eme siècle et la logique coloniale conduit ces procès (comme dans la ville de Salem) à juger des femmes esclaves pour des actes considérés comme des outrages par les colons. La pendaison n’est plus une illusion et plusieurs d’entre elles seront pendues.

Maryse Condé conte l’histoire de Tituba, qui est l’une d’entre elles et qui très tôt dans sa vie cultive des connaissances transmises par sa mère esclave elle aussi. Cela va lui permettre d’aider ses pairs dans les plantations, de les soigner, de développer une empathie hors norme mais aussi d’entretenir un rapport à la mort tout particulier. Malheureusement, ces connaissances multiples la feront aussi passer pour une sorcière aux yeux des colons et on se rend compte rapidement que les difficultés vont se multiplier pour elle. C’est une lecture nécessaire qui mêle plusieurs sujets et qui questionne la place des femmes au XVIIe siècle dans la société esclavagiste de l’époque. On constate à plusieurs reprises que les discriminations envers les femmes viennent s’ajouter aux conditions de vie liées à l’esclavage et à la ségrégation raciale.

Maryse Condé rend hommage à Tituba en reconstituant un récit à la frontière entre la fiction et la réalité. C’est une vie qui est contée à travers une histoire puissante, un livre à découvrir et à faire découvrir.

Moi, Tituba sorcière… Noire de Salem, ed. Gallimard, coll. Folio, 8,40 euros, 288 pages.

Le Chœur des femmes / Martin Winckler

« Le Chœur des femmes » de Martin Winckler, médecin et écrivain. Le roman est édité chez les éditions POL initialement et est sorti par la suite en poche chez Folio.

Jean Atwood est un jeune interne amené à réaliser son dernier semestre d’internat dans un service de consultation gynécologique. Pas n’importe lequel puisque c’est le service du docteur Franz Karma, un docteur dont Jean Atwood a entendu parler et qui représente tout ce que l’interne déteste. Sauf qu’entre les rumeurs sur ce médecin et la réalité, évidemment il y a des nuances. Jean souhaite donc passer par ce service pour obtenir le meilleur poste possible par la suite en chirurgie en faisant jouer les recommandations des chefs de clinique et autres médecins. Mais c’est sans compter sur la singularité de l’équipe soignante que l’interne va rencontrer.
Je me suis laissé porter par ce roman et ce fut pour moi une très belle surprise. On retrouve des thèmes forts dans ce livre, peu traités dans la fiction en général. Des thèmes par ailleurs récurrents chez Martin Winckler lorsque l’on écoute l’auteur donner des interviews. On en apprend beaucoup dans ce roman, que ce soit sur les violences gynécologiques, la contraception, les violences médicales au sens large ou encore la relation entre un soignant et un soigné et j’en oublie certainement. C’est le premier livre de Martin Winckler que je lis et ça m’a vraiment donné envie de me plonger dans sa bibliographie. N’hésitez pas si vous croiser ce bouquin, on se documente et on suit avec plaisir la pensée de Jean Atwood et ses rencontres. Les chapitres défilent.

Le Chœur des femmes, ed. Folio, 10.20 euros, 688 pages.

Concevoir un site comme celui-ci avec WordPress.com
Commencer