L’anguille / Valentine Goby

Un court roman jeunesse touchant sur la différence.

Camille d’un côté et Halis de l’autre. Camille vient d’arriver dans le collège et a la particularité d’être née sans bras. Les gens étaient habitués là où elle vivait, mais dans ce nouveau collège le regard des autres élèves devient difficile à supporter. La jeune fille ne vit pas bien son déménagement. Halis, un petit gars de 13 ans d’origine turque, voit l’arrivée de Camille dans sa classe comme une opportunité pour lui de se mettre en retrait. Il est d’habitude la cible des critiques des autres dans la classe en raison de son surpoids. Valentine Goby écrit avec « L’anguille » un roman sur l’adolescence et notamment les questions autour du harcèlement scolaire. Elle restitue très bien l’âpreté des relations entre les collégiens, qui ne se laissent rien passer entre eux. On suit ces deux personnages attachants qui vont être capables de se réinventer pour passer outre les moqueries. Un court roman accessible qui touche, et toujours avec la plume remarquable de l’autrice.

L’anguille, ed. Thierry Magnier, 11,50 euros, 143 pages.

Murène / Valentine Goby

Un roman sur le rétablissement d’un homme et qui laisse à penser sur la réception du handicap dans la société d’après guerre.

L’intrigue se déroule dans les années 50, ce qui correspond aux débuts de l’handisport. François, le personnage de Valentine Goby, est amené dans les premiers temps du livre à se rendre dans les Ardennes en camion pour y travailler sous la neige. Le camion tombe en panne et François en allant chercher de l’aide se retrouve à monter sur un wagon pour repérer un village aux alentours. C’est là que l’accident arrive et que le jeune homme de vingt-deux ans est électrocuté par la ligne à haute tension. Il s’en sortira avec un handicap physique en perdant ses deux bras. L’autrice à partir de cet évènement marquant développe la vie d’un homme qui tente de se construire avec un handicap, dans une société qui stigmatise et ne facilite rien. François lutte pour retrouver une vie normale, sa famille et ses proches tentent de l’aider et le livre a aussi de très beaux passages sur le rôle des aidants. L’écriture de Valentine Goby est au plus près du corps, de la chair. On sent que la romancière a accumulé de la documentation et que rien n’est laissé au hasard dans les descriptions cliniques de la guérison, du rétablissement, de la vie sans ses deux bras. Jusqu’au jour où François se rapproche d’une amicale de sportifs qui ont la particularité d’être aussi porteurs d’un handicap comme lui. C’est le début d’une nouvelle période importante de sa vie dans laquelle il va redécouvrir son corps et son rapport au monde à travers l’activité physique. Pour cela il choisit la natation qui aux premiers abords lui semble dangereuse et compliquée. Un sport qui sera ensuite une vraie révélation pour avancer au quotidien. Le lecteur perçoit alors petit à petit le lien qui se tisse avec les prémices de l’handisport en France. « Murène » est un très beau roman aboutit sur la question du handicap et du corps, sur ce que cette question charrie dans la société française d’après guerre notamment avec les blessés de guerre. Les descriptions sont cliniques, les sensations des personnages sont palpables.

Murène, ed. Actes Sud, 21,80 euros, 384 pages.

Riposte / Louisa Reid

Un roman fort sur le harcèlement, qu’on lit comme un souffle.

Lily vit très mal ses années collège, elle est harcelée à cause de son poids. Comme un cercle vicieux, elle ne voit pas d’issue et tente de garder toute cette souffrance pour elle. Elle ne veut pas en rajouter auprès de ses parents, qui s’inquiètent quand même. Et son père décide un jour de l’inscrire à un cours de boxe pour qu’elle essaie. Qu’elle puisse avoir du répondant, que quelque chose change. Lily septique au début se prend au jeu et c’est pour elle le début d’une toute nouvelle période. Elle se redécouvre au contact de ce sport et cela va ensuite aller au-delà. « Riposte » aborde avec justesse la question du harcèlement, en utilisant une forme unique. Les phrases très courtes s’enchainent, se réduisent, s’étirent, au gré des sentiments qui traversent la jeune adolescente. On est au plus près de ce que vit le personnage et c’est bien vu. On ne tombe pas dans la caricature et sa vie est vraisemblable dans son collège. Tout comme les réactions des autres. Un roman jeunesse qui permet une porte d’entrée sur le harcèlement et sur la grossophobie.

Riposte, ed. Bayard, 14,90 euros, 256 pages.

Le Ladies Football Club / Stefano Massini

Un essai très bien amené qui aborde la naissance d’une équipe de foot féminin pendant la première guerre.

1917. Première guerre mondiale. Les hommes sont au front et dans une usine d’armement en Angleterre, des ouvrières s’organisent pour former une équipe de football. Lors d’une pause casse-croute, elles découvrent le football avec une fausse bombe qui sert de prototype habituellement. Tout part de là. L’équipe se forme avec onze joueuses aux personnalités marquantes. Plusieurs matchs se mettent alors en place avec des adversaires plutôt variés. Le foot féminin tout comme leurs conditions de femme ne valent pas grand-chose et les ouvrières vont en faire les frais. Elles sont pourtant pleines d’énergie et remettent en question ce qui les enclave. Le foot peut devenir une transgression. Elles finissent par devenir des pionnières et rencontrent un certain succès. Le Ladies football club est un document plein de bonnes idées dans sa forme et qui aborde un sujet méconnu. A découvrir !

Traduit de l’italien par Nathalie Bauer.

Le Ladies Football Club, ed. Globe, 20 euros, 192 pages.

Ne t’arrête pas de courir / Mathieu Palain

Une singulière rencontre entre un auteur et un jeune athlète qui mène une double vie. Au plus près de son sujet Mathieu Palain livre un sacré bouquin.

Plus abouti que « Sale Gosse », le dernier livre de Mathieu Palain raconte l’histoire d’une rencontre entre l’auteur et Toumany Coulibaly. Toumany est un jeune qui a deux vies. L’athlétisme d’un côté et le vol de l’autre. Ce qui devait être un portrait va vite devenir beaucoup plus lorsque l’auteur décide d’en faire un livre. Il prend d’ailleurs la parole au fil du récit en racontant comment il construit son portrait et surtout comment il vit cette rencontre. Avec beaucoup de sincérité et de réalisme, dans un style concis qui fonctionne très bien, l’auteur livre un bouquin où l’on sent que la relation entre les deux va au-delà du simple portrait et qu’une amitié pointe. Il est question de la prison, de l’enfermement, du sport de haut niveau, des stigmates qui marquent certains jeunes et bien d’autres choses encore. À l’arrivée ça donne un livre qu’on a du mal à lâcher et on est emporté par cette histoire.

Ne t’arrête pas de courir, Ed. L’iconoclaste, 19 euros, 422 pages.

Concevoir un site comme celui-ci avec WordPress.com
Commencer