Au printemps / Karl Ove Knausgaard

Un récit autobiographique touchant sur la paternité.

Je découvre le cycle autobiographique de l’auteur avec « Au printemps ». Un cycle appelé « Le quatuor des saisons » et dédié à sa fille, son quatrième enfant. Un nouveau-né de trois mois à qui il s’adresse tout au long du livre, tout au long d’un trajet avec elle dans la campagne suédoise. Avec un ton plein de sincérité, Karl Ove Knausgaard relate à sa petite fille une journée de sa vie et notamment un drame qui va directement impacter son quotidien. C’est aussi l’occasion pour lui de se confier sur comment il a traversé cette épreuve, ou comment il vit sa paternité et les relations au sein de sa famille nombreuse. Au final cela donne un texte touchant et qui ne ressemble à aucun autre. On se laisse porter par ce bouquin. J’ai apprécié y revenir et retrouver sur de petites plages de lecture la plume de l’auteur.

Au printemps, ed. Folio, 8,90 euros, 256 pages.

Le récit du combat / Luc Lang

Un livre autobiographique sur une vie intimement liée aux arts martiaux.

Luc Lang s’éloigne de la fiction pour revenir sur son parcours de vie et les épreuves qu’il a pu traverser. A commencer par un souvenir, un souvenir qui débute le livre, une rencontre qui préfigure la suite lorsque son beau père un grand maître de judo lutte avec lui pour rire et qu’il n’est encore qu’un petit garçon. Commence alors à partir de cet évènement un questionnement et une relation complexe aux arts martiaux. Un fil rouge qui va le suivre toute sa vie. Le judo d’abord puis le karaté ensuite. Cette relation complexe se tisse autour d’autres évènements de la vie de l’auteur, que ce soit sa paternité, la relation avec sa mère, son rapport à l’écriture. Luc Lang se dévoile avec une très belle écriture et comme dans « La tentation » on retrouve une langue travaillée qui séduit par les images qu’elle évoque et en même temps qui ne tombe pas dans le pathos. On suit les pensées, les évènements marquants de la vie de l’auteur et de nombreuses réflexions planent au fur et à mesure de la lecture. Notamment les allers et retours avec la notion de combat sous toutes ses formes. A l’arrivée cela donne un livre autobiographique qui revêt une forme unique et qui touche par sa sincérité.

Le récit du combat, ed. Stock, 21,50 euros, 360 pages.

Un peu plus loin / Guilhem « Pone » Gallart

Le témoignage fort de Pone de la FF.

Le témoignage fort d’un des membres fondateurs de la FF. Le beatmaker Pone revient sur sa vie, ses débuts dans le rap, sa jeunesse à Toulouse. Il découvre en 2017 qu’il est atteint de la maladie de Charcot. Après des années de lutte il retrouve l’envie de composer et celle plus nouvelle d’écrire. Ce livre en est le résultat. Au gré des anecdotes et avec un ton plein de sincérité, l’auteur écrit sur un riche parcours de Marseille à New York, les épreuves et expériences qu’il a traversées. On découvre un beatmaker hors pair, véritable passionné de rap et autre genre musical à sampler. On repère vite de nombreuses références passionnantes à creuser. « Un peu plus loin » forme un récit autobiographique qui touche le lecteur, dans la lignée des livres édités chez La Grenade. Un texte fort et marquant.

Un peu plus loin, ed. JC Lattès, coll. La Grenade, 20,90 euros, 368 pages.

Le Grand Saut / Thibault Bérard

Un homme sur le point de mourir se remémore sa vie passée.

Comme souvent chez Thibault Bédard l’histoire part d’une idée originale et c’est encore le cas dans ce troisième roman. On découvre la vie de Léonard alors qu’il s’apprête à mourir seul dans sa cuisine après avoir tenté de réparer son évier. Alors que la vie le quitte, il voit défiler les moments marquants de son existence et surtout la saveur d’une époque où il n’était pas cet homme solitaire isolé dans son chalet. Il se rend compte qu’il est passé à côté avec ses proches à plusieurs reprises. Que ce soit sa femme Lise ou ses enfants. On découvre tous ces autres personnages qui gravitent encore ou non autour de lui. Léonard est un personnage ambivalent, mais avec lequel on a certains moments de l’empathie. L’auteur aborde la question de la perte, de la mort, du temps qui passe et surtout des liens familiaux avec talent. La famille est un thème central dans les romans de Thibault Bérard et dans « Le grand saut » on retrouve une nouvelle fois ce thème. J’avais beaucoup aimé les deux précédents et « Le grand saut » fonctionne aussi très bien. C’est court et prenant. On le lit quasi d’une traite. Il offre un concentré d’émotion et de scènes qui touchent sans tomber dans le cliché. C’est d’ailleurs un exercice difficile de faire sourire avec les sujets pas toujours fun qui sont abordés. Et en même temps on est pris dans ces vies, les vies d’une famille qui tente de traverser les épreuves.

Le Grand Saut, Ed. de l’Observatoire, 20 euros, 208 pages.

Les enfants véritables / Thibault Bérard

Un roman qui aborde le lien maternel et la famille recomposée avec justesse.

Après le coup de cœur du premier roman, je me demandais ce que ça allait donner avec ce second roman de Thibault Bérard. On retrouve des personnages du roman « Il est juste que les hommes soient frappés » mais pour autant il est possible de lire les deux indépendamment. Théo veuf avec ses deux enfants tente de maintenir le cap après avoir traversé une épreuve très difficile dans le premier roman. Et Cléo sa conjointe qu’il a rencontré à la fin du premier roman et avec qui il construit sa famille. Avec un mélange d’humour et de tendresse pour ces personnages l’auteur sans tomber dans le pathos écrit avec beaucoup de justesse sur les relations humaines et notamment celle dans les familles recomposées. Le roman questionne la place des enfants, du couple, des injonctions dans la maternité ou encore des sujets que l’on aborde avec des enfants. Une nouvelle fois un roman qui est très agréable à lire et qui touche. Une lecture qui donne envie de la faire découvrir autour de soi et qui donne envie d’en discuter. Thibault Bérard a beaucoup de talent pour dépeindre cette famille qui traverse des épreuves et c’est loin d’être évident de restituer toutes les émotions qui traversent ce riche bouquin. Un nouveau coup de cœur.

Les enfants véritables, ed. de l’Observatoire, 20 euros, 288 pages.

Toutes les femmes sauf une / Maria Pourchet

Un court récit tendu sur l’expérience de la maternité et celle de l’accouchement.

Comme dans un souffle, Maria Pourchet écrit un court récit à forte teneur autobiographique sur la maternité. De l’avant accouchement à l’arrivée de sa fille, l’autrice écrit sur tout ce que peut renvoyer ces instants. Cela remue des choses par rapport à elle mais aussi par rapport à sa famille et à son passé, notamment son enfance. Des douleurs, des souvenirs marquants, la maternité est vécue comme un évènement qui remet en question la narratrice. Elle s’adresse à sa fille tout au long du texte et constate dans quelles conditions elle est prise en charge à l’hôpital. Ces passages sont plein de lucidité sur les conditions de travail des soignants et des soignantes qui se dégradent et qui se répercutent sur les patients. Ce petit récit réaliste permet de rendre compte de l’expérience de la maternité sans s’arrêter aux nombreuses images idéalistes qui circulent. On retrouve avec plaisir l’écriture sans filtre et sans détour de Maria Pourchet.

Toutes les femmes sauf une, ed. Le livre de poche, 6,90 euros, 128 pages.

Être à sa place / Claire Marin

Comment se situer dans la société ? Entre impératifs sociétaux et marge de manœuvre personnelle, éléments de réponse avec Claire Marin.

Claire Marin continue d’approfondir ses questionnement sur les relations humaines et notre rapport au monde. Elle abordait avec beaucoup de justesse la question de la rupture sous toutes ses formes dans son livre précédent. Dans celui-ci il est question de la place que l’on occupe (ou non) dans la société. Comment se sent-on par rapport à cette place ? Est-ce- qu’elle nous semble légitime ? Pourquoi ressentir le besoin de changer de place ? Ou encore qu’est-ce que veut dire se sentir à sa place ? Autant d’interrogations qu’elle prend le temps de décortiquer avec beaucoup de pédagogie sans tomber dans un énième texte sur le développement personnel. Un essai très agréable à lire avec des références variées (des romans plus ou moins contemporains comme Histoire de la nuit de Laurent Mauvignier, des essais). Claire Marin aborde les épreuves de la vie au prisme de la philosophie et encore une fois c’est réussi.

Être à sa place, ed. de l’Observatoire, 18 euros, 240 pages.

Le Jeu de la dame / Walter Tevis

L’ascension pleine d’embûches d’une jeune prodige des échecs.

Une très bonne surprise ce roman de Walter Tevis, initialement paru en 1990 en France et réédité cette année chez la très bonne maison Gallmeister. Je n’ai pas vu la série sur Netflix, mais j’en ai entendu parler autour de moi, et si la série est aussi addictive que le livre il y a des chances pour que je jette un œil. Nous sommes en 1957 dans le Kentucky et Beth Harmon après la mort de sa mère est placée dans un orphelinat à l’âge de 9 ans. Les enfants de cet orphelinat sont drogués avec des médicaments (on pense à la Ritaline) pour qu’ils ne posent pas de difficulté notamment de comportement. Beth s’ennuie ferme et tombe un jour sur un factotum qui joue aux échecs dans un sous-sol de l’orphelinat. C’est le début d’une grande découverte pour elle, celle du monde des échecs. À partir de là l’histoire décolle et on suit l’ascension singulière et loin d’être simple d’une jeune pleine de talents. On pourrait penser que c’est un jeu de société plutôt ennuyant et difficile à mettre en scène dans une fiction. Walter Tevis relève le défi haut la main. On se laisse emporter par les parties, par les ambiances des tournois. On vibre avec Beth, jeune joueuse qui représente aussi (contre son gré) la gent féminine dans un jeu très masculin. C’est un roman qui est traversé par plusieurs thèmes au-delà des échecs et c’est un régal du début à la fin, une fiction passionnante. Comme quoi la façon d’écrire sur un thème peut être bien plus importante que le thème lui-même. Walter Tevis est vraiment doué. Avez-vous lu d’autres livres de cet auteur ? Je suis curieux d’en découvrir.

Le Jeu de la dame, ed. Gallmeister, 11,40 euros, 448 pages.

Concevoir un site comme celui-ci avec WordPress.com
Commencer