Après nous le déluge / Yvan Robin

L’eau inonde les trois quarts de la planète. Un père et son fils tentent de survivre au milieu de la catastrophe.

Feu-de-bois vit avec son père dans une bicoque reculée, depuis la mort de sa mère. Il sort de l’école avec son amie Dalila au début du roman lorsque de dramatiques événements climatiques arrivent. Un déluge de pluie s’abat sur la surface du globe et terre tremble à plusieurs reprises. L’eau engloutit tout sur son passage et le père et le fils chacun de leur côté vont tenter d’y faire face. Dans un récit âpre et où il ne reste plus beaucoup d’humanité, Yvan Robin invite les lecteurs à découvrir un monde ravagé par l’eau et dans lequel le soleil ne se lève plus. Un monde où l’on lutte pour sa survie. On suit le père et le fils dans deux narrations qui alternent. « Après nous, le déluge » est un roman qui sonne, on ressent la détresse des personnages et les sentiments qui les traversent face à ce monde devenu méconnaissable et hostile.

Après nous le déluge, ed. in8, 18 euros, 240 pages.

La route / Cormac McCarthy

Un roman sombre porté par une écriture ciselée. Une claque.

Un père et son fils se retrouvent dans un monde dévasté où il reste quelques humains luttant pour leur survie. Le père est affaiblie et est prêt à tout pour protéger son fils, qui lui est terrorisé et tente de donner du sens à tout ce qui l’entoure. Le lecteur va les suivre dans cet état de vigilance permanent, ne restant jamais au même endroit trop longtemps et traversant une nature souvent hostile. Cormac McCarthy a une sacré plume. C’était prévisible avec ce roman connu et dont on parle beaucoup mais tout de même, quelle claque. Il n’y a rien de trop, que ce soit dans les descriptions, dans les scènes décrites ou dans les dialogues. L’atmosphère y est pesante. Jusqu’à un final qui souffle aussi et qui permet de découvrir un raconteur d’histoire hors pair.

Traduit par François Hirsch.

La route, ed. Points, 7 euros, 256 pages.

Le Sanctuaire / Laurine Roux

Un roman qu’on ne lâche pas, sur une famille qui vit en autarcie après une catastrophe.

Dans un monde où une catastrophe a réduit à peau de chagrin la population mondiale, une famille se retrouve retranchée dans les montagnes et vit en autarcie dans une cabane. Un lieu appelé « Le sanctuaire » et qui est préservé du monde extérieur par le père de la famille notamment, très protecteur envers ses deux filles. Le monde d’avant resurgit par bribes de temps à autre, lorsque le père s’absente pour récupérer des denrées et qu’il croise d’autres survivants. Pour la mère, c’est par le discours que la nostalgie se met en place lorsqu’elle raconte des scènes du monde d’avant à ses filles. Laurine Roux emmène le lecteur au sein de cette famille et plusieurs thèmes sont abordés autour de la parentalité, de ce que peut représenter le fait de protéger ses enfants ou encore les différentes facettes qui peuvent naitre chez des parents lorsqu’ils élèvent des enfants, y compris les facettes plus sombres. Entre les deux sœurs, il y a des caractères qui divergent au début du récit avec Gemma qui est née dans « Le sanctuaire » et qui ne connait que cet environnement sauvage dans lequel elle a grandi et qui avec l’aide de son père, a fait d’elle une chasseuse hors pair. June de son côté connait le monde d’avant et a un rapport totalement différent à la nature qui l’entoure. Elle ne ressent pas le même sentiment de liberté que sa sœur.

Je découvre Laurine Roux avec ce roman que j’ai dévoré. Un récit à la lisière du roman noir et de l’imaginaire. Un récit parfois sombre, parfois lumineux. L’écriture sans fioriture n’y est pas étrangère et évoque en quelques mots des images chez le lecteur. Une petite pépite ce bouquin.

Le Sanctuaire, ed. du Sonneur, 16 euros, 160 pages.

Trois fois la fin du monde / Sophie Divry

Un récit qui questionne la solitude et l’enfermement à travers une narration originale.

Joseph Kamas décide de filer un coup de main à son frère sur le braquage d’une bijouterie. Peu porté sur l’action d’habitude, il se retrouve au milieu du braquage et tout dégénère. Son frère est tué après avoir ouvert le feu et Joseph prend la direction de la prison. Débute une rude découverte du milieu carcérale et de ses règles dans la première partie du livre, jusqu’à un évènement plutôt inattendu qui va changer la donne. Ce serait dommage d’en dire plus mais le personnage va apprendre à se réinventer dans un nouvel environnement.

Sophie Divry décrit toujours aussi bien les sentiments qui habitent ses personnages. Joseph prend de plein fouet dans la tête et dans sa chair son arrivée en prison. L’autrice relate avec beaucoup de précision les différents sentiments par lesquels il passe, notamment lorsque les choses évoluent dans la seconde partie du roman. J’aime beaucoup la façon de passer de l’action à des passages plus contemplatifs, d’un paragraphe à l’autre. On sent la recherche du mot juste et un travail intéressant sur la narration.

Le récit laisse une belle place à la réflexion, en questionnant la solitude, le rapport à l’autre ou encore les différents types d’enfermements que l’on peut croiser dans une vie. Un roman original et prenant, qui dépayse comme souvent chez Sophie Divry.

Trois fois la fin du monde, ed. Notabilia, 16 euros, 240 pages.


Les rêves qui nous restent / Boris Quercia

Un roman prenant à la frontière entre le roman noir et la science fiction, sombre à souhait.

Boris Quercia change de registre après avoir fait bourlingué pendant plusieurs romans noirs son personnage marquant et taciturne Santiago Quiñones, flic à Santiago au Chili. Dans « Les rêves qui nous restent », l’auteur emmène son lecteur dans une société futuriste. Il construit un monde autour d’une population privilégiée qui vit dans la City et qui est séparée par une frontière avec le monde extérieur, hostile et où les lois n’ont plus cours. La City fonctionne grâce aux travailleurs pauvres qui traversent tous les matins la frontière et qui font tourner l’économie. Des robots, les « électroquants », plus ou moins évolués selon les richesses de leurs propriétaires, accompagnent les hommes pour les aider dans leurs tâches au quotidien et une partie de la vie est régit par les relations avec ces machines. Les relations avec les « électroquants » ne se sont d’ailleurs pas toujours passées sereinement comme vous le découvrirez. Dans cet univers singulier, le lecteur fait connaissance avec un nouveau flic, Natalio. Un classe 5, autrement dit un flic relégué à des tâches plutôt ingrates et qui est obligé de compléter son petit salaire avec des missions officieuses. Il se retrouve sur une affaire où une grande entreprise cherche à cacher des choses. Il met alors le nez dans un maelstrom qui va l’amener à croiser des syndicalistes ambiguës, des trafiquants ou encore de riches personnages hors sols.

On retrouve la patte des polars de Boris Quercia dans ce roman, qui transpose à merveille dans un univers de science fiction l’ambiance sombre et l’atmosphère pesante caractéristiques de l’auteur. De la politique à la santé mentale en passant par les questions que posent les avancés technologiques, ce quatrième roman de l’auteur est passionnant. Les robots peuvent-ils devenir autonomes ? Pour quelles conséquences ? Comment les populations sont manipulées dans cette société ? Quel rôle joue la psychiatrie ? Quelles matières premières deviennent précieuses dans ce contexte ? Autant de questions qui se posent au fil du récit tout en tenant en haleine le lecteur lorsque les évènements s’accélèrent pour Natalio. Le progrès a parfois un coût exorbitant que ce soit financier ou humain. « Les rêves qui nous restent » nous le montre très bien. Si vous ne connaissez pas la plume de cet auteur c’est une très belle occasion de la rencontrer. Un roman qui happe, qui ne rassure pas et qui fait réfléchir. Un vrai coup de coeur.

Traduit par Gilles Marie et Isabel Siklodi.   

Les rêves qui nous restent, ed. Asphalte, 20 euros, 208 pages.

Rien ne t’appartient / Nathacha Appanah

Un deuil en appelle un autre. Le passé peut alors ressurgir.

Un roman construit avec brio où la question du deuil se mêle au portrait d’une femme, notamment son enfance qui va faire écho avec les événements qu’elle vit. Difficile de restituer des ressentis à la lecture de ce livre, c’est prenant et on se laisse complètement happer par le rythme de l’autrice. Que ce soit l’écriture ou les thématiques abordées (la famille, la condition féminine, la filiation ou encore l’enfance), c’est toujours très juste dans les descriptions et en même temps l’autrice donne le parole comme souvent à des personnes marginalisées. Lisez-le sans hésiter, les livres de Nathacha Appanah touchent au coeur et je ne regrette pas de l’avoir découverte avec « Tropique de la violence ».

Rien ne t’appartient, ed. Gallimard, 16,90 euros, 160 pages.

Plage de Manacorra, 16h30 / Philippe Jaenada

Une famille qui a la poisse prend des vacances dans les Pouilles.

Un père emmène sa femme et son fils en Italie et plus précisément dans les Pouilles pour y passer un séjour. La famille connaît le coin et a hâte de prendre le rythme des vacances. Évidemment les choses simples s’arrêtent là et un feu se déclare dans l’arrière-pays. La suite je vous laisse la découvrir, c’est prenant, caustique et réussi. Bref Jaenada.

Plage de Manacorra, Ed. Points, 6,50 euros, 224 pages.

Soleil de cendres / Astrid Monet

Récit réaliste et prenant d’un futur proche assez flippant.

Solal ressent un mélange d’excitation et d’appréhension. Il se rend à Berlin avec sa mère Marika pour rencontrer son père, Thomas. C’est la première fois qu’il le rencontre et on sent que c’est aussi compliqué pour Marika de retrouver son ancien compagnon. C’est pourtant une promesse qu’elle souhaite tenir pour son fils.

Nous sommes dans un futur proche et les effets du réchauffement climatique sont omniprésents. Pour Solal et Marika, les trois jours passés à Berlin vont se transformer en véritable cauchemar. Au-delà de la canicule qui s’abat depuis un certain temps déjà sur l’Europe, d’autres événements vont venir compliquer (le mot est faible) ces retrouvailles. Marika, Thomas et Solal vont alors devoir faire face à l’inimaginable.

Ce roman pas si éloigné d’une réalité possible, retranscrit très bien une atmosphère pesante. Ça prend aux tripes de suivre les péripéties de cette famille qui tente de s’en sortir au milieu de ce chaos.

Soleil de cendres, Ed. Agullo, 19 euros, 224 pages.

Quand la forêt brûle / Joëlle Zask

Penser la nouvelle catastrophe écologique.

Ce livre est éclairant sur la question des incendies qui se déclarent à travers le monde et plus particulièrement sur ce que l’on appelle les « mégafeux ». Des incendies dévastateurs que l’on peut difficilement circonscrirent et qui détruisent tout sur leurs passages. Joëlle Zask, enseignante en philosophie, est passionnante dans cet essai et convoque plusieurs disciplines pour questionner ce phénomène. L’autrice nous montre ce que le phénomène nous donne à voir de nos sociétés, sans jamais tomber dans le dogmatisme. Elle ne valorise pas plus un point de vue où les écologistes souhaiteraient laisser faire la nature (et donc les incendies) par rapport à un autre point de vue où les autorités souhaiteraient lutter à tout prix contre toutes formes d’incendies (vous verrez que ce n’est pas non plus si malin).

Il existe tout au long du livre un questionnement sous-jacent qui concerne l’écologie dans un sens plus général. Le rapport de l’homme à la nature, aux forêts, aux paysages environnants. C’est riche et l’on ressort de cette lecture avec l’envie d’approfondir des passages.

Quand la forêt brûle, ed. Premier Parallèle, 17 euros, 208 pages.

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