Un colosse / Pascal Dessaint

L’histoire d’un homme à la stature hors normes au 19 eme siècle.

L’auteur s’éloigne de ses romans noirs habituels dans « Le colosse ». Il se penche sur le cas d’un homme au 19eme siècle, Jean-Paul Mazias. Ce dernier est né en 1847 dans le sud-ouest de la France. Il est issu d’un milieu paysan et à une taille et une stature hors normes. Il va en faire les frais toute sa vie et Pascal Dessaint qui a fouillé les archives de Haute-Garonne déterre un ensemble d’anecdotes qui vont former ce singulier bouquin. L’auteur restitue la vie d’un paysan dans un contexte politique que l’on redécouvre. Un voyage dans le temps qui se rapproche tout de même des thèmes que l’auteur affectionne, notamment la paysannerie et les rapports à la nature. On découvre un homme que l’on a défini neuf fois sur dix en fonction de sa singularité. Un homme qui a connu une ascension surprenante notamment dans le milieu de la lutte. Jean-Paul Mazias va malheureusement connaître l’ascenseur dans l’autre sens et sa vie va finir par se compliquer. Pascal Dessaint écrit un roman à la frontière entre fiction et documentaire. On découvre une période de l’histoire de France à travers sa ruralité. On découvre comment les singularités physiques étaient vécues à cette époque. Un livre original et bien ficelé.

Un colosse, ed. Rivages, 14 euros, 112 pages.

Encore vivant / Pierre Souchon

Un témoignage plein de justesse sur la bipolarité.

Pierre Souchon est journaliste pour le Monde diplomatique notamment et il relate dans ce livre son expérience de la bipolarité. À travers un texte émouvant et très bien écrit l’auteur aborde la question de la psychiatrie en France. Le rapport à la santé mentale de la population et le regard que portent les gens sur ces personnes stigmatisées en un rien de temps. « Encore vivant » c’est aussi un livre sur un monde qui s’éteint, le monde paysan. En effet l’auteur est issu d’une famille de paysans et voit l’environnement agricole changer sous ses yeux. On pense à la justesse du ton d’un livre comme « Pleine terre » de Corinne Royer (si vous ne l’avez pas lu celui-ci foncez). Avec l’arrivée de la concurrence, les nouvelles machines, etc, le métier d’agriculteur est en perte de sens et ce livre poignant l’illustre très bien. Avec une écriture ciselée et une gouaille bien à lui sur certains passages, on découvre un auteur qui tente de surnager à travers sa pathologie.

Encore vivant, ed. Actes Sud, 8,30 euros, 288 pages.

Pleine terre / Corinne Royer

Le récit d’un monde paysan qui change et qui broie.

Jacques Bonhomme est agriculteur. Le genre d’agriculteur qui abat en une semaine la même quantité de travail que trois de ses collègues. Grand, costaud et taciturne, il aime son métier et vit seul sur son exploitation avec son bétail et ses livres. Sauf que les injonctions demandées par les organismes de contrôle du bétail sont de plus en plus nombreuses. Les logiques marchandes de l’agroalimentaire lui parlent de moins en moins. Le bien être animal n’est même plus une question qui se pose. Jacques doit entrer dans des normes bien trop étroites pour lui et à l’opposé de ses convictions. Alors Jacques libère quelque chose en lui. Et le roman démarre sur le premier jour de sa cavale. Une fuite en avant que l’on va découvrir au fil du récit.

Corinne Royer écrit un très beau roman porté par une langue qui crée en quelques lignes les images et les atmosphères d’un monde rural qui change, qui broie. On y rencontre l’entourage de Jacques et on comprend petit à petit les raisons de ses actes. On regarde impuissant la logique de rentabilité s’imposer comme dans de nombreuses sphères de la société. L’autrice livre un roman bouleversant, inspiré d’un fait réel. La fiction a le pouvoir de faire réfléchir et de montrer le monde tel qu’il est, sans détour. Ce livre en est la parfaite illustration.

Extraits : « Alors je me suis souvenu du jeune homme qui était entré dans la cuisine et nous avait trouvés là, la mère de Paulo et moi, vidant nos verres et nos cœurs de chaque côté de la table. »

« […] puis il enfonça le petit carnet dans la poche de son blouson avec autant de précaution qu’il l’aurait fait d’une grenade dégoupillée. Il était heureux d’avoir choisi les mots pour armes, il espérait seulement viser juste. »

Pleine terre, ed. Actes Sud, 21 euros, 336 pages.

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