La prochaine que tu mordras la poussière / Panayotis Pascot

Le récit de soi et d’une relation au père.

En revenant sur son parcours et sur sa relation à son père, Panayotis Pascot écrit un récit autobiographique dans lequel chaque mot est pesé. L’auteur est un fin observateur de nos comportements et ça se sent. Que ce soit lorsqu’il revient sur son enfance ou sur ses premières découvertes de la sexualité, Panayotis Pascot se livre sans détour en choisissant l’image juste, en mettant en évidence le ressenti qu’il a perçu à ce moment-là de sa vie. Il est aussi question de nos contradictions, à commencer par les siennes. Ce récit plein de lucidité touche le lecteur, notamment cette relation à son père qui évolue, mais qui est loin d’être simple. Passer à l’écriture, poser des mots sur ses sentiments, il a très tôt procédé de la sorte et cela fonctionne très bien dans « La prochaine fois que tu mordras la poussière ». Après avoir travaillé pour la télé puis après avoir tourné avec son spectacle, l’humoriste prend le temps de s’arrêter sur sa vie, sur ses épreuves. Le temps de l’écriture a toute son importance. La lecture est fluide et on prend beaucoup de plaisir à suivre les pensées de ce narrateur qui se cherche.

extrait : « Moi aussi j’avais cet équilibre « ça ne sort pas, ça ne rentre pas ». Puis j’ai décidé de me battre contre. J’ai commencé à vouloir faire l’inverse de mon père, à vouloir tout faire sortir. Et j’ai choisi ce métier. Parler de soi, tout le temps, partout. Vider son sac, sur scène, à la télé, dans un bouquin. Ça me fait du bien, ça m’aide à me comprendre, à me sentir, à me constater, comme on constate un accident. On voit là où il y a des dégâts puis on essaie de combler, de repeindre, de réparer. On répare mieux quand c’est dehors, quand c’est visible, concret. »

La prochaine fois que tu mordras la poussière, ed. Stock, 19,50 euros, 240 pages.

Champion / Maria Pourchet

Un adolescent en marge livre ses pensées et son parcours.

Début des années 90, un jeune adolescent se retrouve dans un centre de repos et se met à écrire son parcours dans des cahiers, suite au conseil de sa psychiatre. Fabien est un garçon à la marge qui a déjà pas mal de casseroles derrière lui et que l’on découvre dans ce centre de repos au début du roman. On comprend au fil de ses cahiers et de son témoignage comment il en est arrivé là, avec une langue et un ton bien à lui. Car comme il le dit lui même il est friand des mots. Fabien a aussi un « double » qu’il a parfois du mal à maîtriser. Un double qui prend la forme d’un loup et qui lui dicte à certains moments ce qu’il doit faire. Maria Pourchet écrit un roman sur un jeune personnage en lutte avec ses démons, un adolescent bien plus complexe qu’il en a l’air. Fabien est lucide, insolent et en même temps il a de grandes difficultés à gérer ses relations sociales. Menteur invétéré, il va tenter d’être honnête dans ce passage à l’écrit et dans ses cahiers. En sous texte, on distingue une réflexion qui laisse à penser sur la psychiatrie et les stigmates que les patients charrient avec eux. Dans « Champion » on est pris par les jeux de mots, par la voix du jeune garçon et surtout par le rythme singulier de l’écriture de l’autrice.

Champion, ed. Folio, 8,70 euros, 256 pages.

Ma tempête / Eric Pessan

Un roman original où une pièce de théâtre s’invite dans la relation entre un père et sa fille.

David est un metteur en scène au bout du rouleau qui voit sa pièce « La tempête » (de Shakespeare) ne pas aboutir. Les relations se tendent dans son couple et il tourne en rond dans son appartement en voyant la précarité le guetter. Jusqu’au moment où la crèche de sa fille ferme à la suite d’un mouvement de grève. Il se retrouve alors seul à la maison avec sa fille et décide de lui interpréter une version de cette pièce de théâtre. Eric Pessan décrit à partir de là une relation touchante entre un père et sa fille. Une fille qui découvre le pouvoir de la fiction, qui n’en saisit pas toutes les nuances mais qui en même temps prend beaucoup de plaisir à suivre l’histoire de son père. David s’apprête alors à passer une drôle de journée dans laquelle les évènements météorologiques vont s’inviter tout comme son frère au fonctionnement opposé à lui. L’auteur s’amuse à dépeindre cette situation, une situation à mi chemin entre le burlesque et le tragique. On est touché par ce père qui au fil de sa journée fait défiler ses souvenirs mais aussi fait défiler les parallèles entre la pièce qu’il souhaitait monter et sa vie. « Ma tempête » est un roman malin et original qui est une très belle découverte. Un bouquin qui ne ressemble à aucun autre et qui aborde avec un angle unique la relation entre un père et sa fille.

Ma tempête, ed. Aux forges de vulcain, 18 euros, 160 pages.

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