Le caprice de vivre / Jade Hilal

Trois trentenaires voient leur colocation parisienne s’effriter.

Ils sont trois, trois colocataires parisiens qui voient s’effriter les relations entre eux. Il y a Hamam, apprenti écrivain qui tente de comprendre pourquoi sa colocation de trentenaires ne tourne plus rond. Il y a Souleymane, excellent élève depuis tout petit et partisan du moindre effort. Il se passionne pour la défense de la cause animale lorsque l’on découvre le personnage au début du roman. Enfin, il y a Warda. Journaliste et grande reporter au Monde, elle est régulièrement en déplacement pour ses reportages et revient d’Irak au début du roman. C’est Hamam qui raconte l’éloignement qui guette les colocataires dans leur appartement parisien. Des tensions naissent. Des portes claquent. Hamam ressent le besoin d’écrire sur ce qu’il se passe, que ce soit l’éloignement du flegmatique Souleymane ou tout l’amour qu’il éprouve pour Warda mais qu’il a bien du mal à lui révéler. « Le caprice de vivre » est un texte tout en finesse et plein de justesse sur ce que recherche ces trentenaires et les sentiments qui les traversent. Encore un excellent bouquin des éditions Elyzad.

Le caprice de vivre, ed. Elyzad, 21 euros, 211 pages.

Le soir du chien / Marie-Hélène Lafon

L’histoire d’une rencontre dans un petit village du Cantal, avec tout ce que cela va engendrer.

Je découvre Marie-Hélène Lafon avec ce court roman et c’est une très belle découverte. L’autrice avec une plume sensible, dépeint le quotidien de Marlène une jeune femme qui vit dans le Cantal. Cette histoire c’est aussi celle de Laurent, menuisier, qui vit avec elle dans leur petite maison. Les choses vont petit à petit se mettent en place autour du duo qui profite de cette maison reculée. On découvre leurs proches, leurs façons d’appréhender le monde. Jusqu’à un soir et jusqu’à un accident, celui qui va venir chambouler leur belle routine. Ce roman est raconté à travers les sentiments de chaque personnage, à travers plusieurs voix. Marie-Hélène Lafon choisit chacun de ses mots et les phrases simples sonnent juste tout comme le rythme qui émerge du récit. « Le soir du chien » est un livre qui prend le temps de décrire les paysages du Cantal, qui prend le temps de poser une atmosphère.

Le soir du chien, ed. Points, 6,20 euros, 160 pages.

Soleil à coudre / Jean D’Amérique

Un roman porté par une langue magnifique, où une adolescente tente de survivre dans les méandres d’un Bidonville de Port-au-Prince.

« Soleil à coudre » est un magnifique roman, porté par une langue acérée. On avance d’image en image, tous les sens en éveil. Jean d’Amérique restitue l’atmosphère tendue des lieux traversés. Dans la Cité de Dieu, un vaste bidonville de Port-au-Prince, on retrouve la jeune narratrice Tête fêlée. Une jeune fille qui grandit à l’ombre de son père, un grand truand du coin qui finit par se tuer avec un révolver le jour de sa naissance. Sa mère, Fleur d’Orange, tente de survivre dans cet environnement en buvant du whisky et en vendant son corps à des clients puissants. Un des lieutenants de l’Ange du métal, le nouveau chef du quartier, rencontre sa mère Fleur d’Orange et devient le père de substitution de Tête fêlée. Un père violent qui ne laisse rien passer.

Tête fêlée est dans cet entre deux, avec la violence du monde des adultes d’un côté et l’envie de profiter des bonheurs de l’enfance et de l’adolescence de l’autre, notamment au lycée, où elle croise Silence. Une jeune camarade qui va envahir ses pensées, jusqu’à ce que Tête fêlée lui écrive et réécrive sans cesse une lettre. Une lettre qui restituerait ses sentiments, ce qu’elle ressent depuis qu’elle l’a rencontrée. Ce trop plein d’émotions qu’elle peine à maitriser et qui sort par écrit. Comme une forme de soupape.

Jean d’Amérique écrit un roman déchirant, sans pathos, où la violence transpire et où le lecteur est immergé dans ce bidonville d’Haïti. C’est un récit sur les ressources insoupçonnées d’une adolescente réservée et sur la volonté d’une mère qui essaie de s’en sortir. Elles tentent toutes les deux de s’extraire d’une longue nuit haïtienne qui n’en finit pas. Pour chercher la fuite. Loin.

Extrait : « Et tout ce qui subsiste de mon chant intérieur, c’est une flopée de métaphores engluées d’images pâles, un poème-douleur. »

Soleil à coudre, ed. Actes Sud, 15 euros, 144 pages.

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