Après le Silence / Didier Castino

Le récit d’un drame au début des 70’s dans un monde ouvrier qui se détériore. Fort.

Didier Castino relate une vie d’ouvrier, celle d’un certain Louis Catella. Un mouleur aciériste qui travaille aux Fonderies et Aciéries du Midi, et qui prend la parole dans un long monologue pour raconter sa vie. Une vie dédiée très tôt à sa condition d’ouvrier, au détriment parfois de sa vie de famille. Une vie dédiée à la lutte, une lutte pour de meilleures conditions de travail dans son usine, une lutte collective via son syndicat. En parallèle à ce récit, c’est aussi l’histoire d’un père qui s’adresse à son plus jeune fils de 7 ans. Un père qui se raconte à son fils avec pudeur. On découvre tout cela dans le monologue qui va le mener jusqu’à un destin tragique dans son usine en 1974. Louis Catella est victime d’une accident de travail et décède. A la suite de cet évènement, le plus jeune de ses fils prend la parole dans un nouveau monologue et raconte la lente et difficile reconstruction d’une famille abimée par la perte, par le deuil. Il cherche à comprendre cet héritage qu’il trouve de plus en plus lourd au fil des années et il ressent le besoin de se détacher de cette figure paternelle, en finissant par adopter des idéaux divergents (politiques, religieux).

J’ai lu il y a un moment de ça le second livre de Didier Castino, « Rue Monsieur-le-Prince », et j’avais déjà beaucoup aimé sa plume pleine d’humanité qui porte sa focale sur des femmes et des hommes marginalisé.e.s. L’auteur aborde des thèmes importants. Il était question des violences policières, d’une jeunesse en lutte et de la montée des extrêmes. Dans celui-ci, Didier Castino se tourne vers le monde ouvrier et sa pesanteur dans la vie des familles. Avec une justesse qui fait penser à Joseph Ponthus, il décrit sans pathos un monde qui broie (aujourd’hui on parle toujours peu des accidents du travail qui coûtent la vie à de nombreux ouvriers tout au long de l’année). On est touchés par l’histoire de cette famille dans ce premier roman. On est touchés par ce récit émouvant et poignant, qui ne fait pas l’impasse sur les ambivalences de chaque personnage.

extrait : « Mais j’arrête maintenant. Tu ne me répondras pas, j’ai compris. J’arrête, on verra bien. Régler mes comptes avec toi, je ne sais pas si c’est possible, foutre en l’air la rengaine, le mythe éternel… Parler après le silence. »

Après le Silence, ed. Liana Levi, 10,50 euros, 224 pages.

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